En septembre prochain mon petit garçon aura 3 ans. Le temps a vraiment
filé... je me souviens encore du jour où nous avons appris que j’étais
enceinte. Je me souviens de la joie, mais aussi de la peur. Et cette peur ne m’a
jamais quitté. Elle ne m’empêche pas de vivre, elle ne me paralyse pas. Au
contraire, cette peur m’oblige à rester en alerte, me fait questionner les
schémas sociaux, me pousse à être toujours la meilleure version de moi-même et
me montre combien la vie est fragile.
Vivre ici et maintenant.
Depuis que je suis devenue maman j’apprends tous les jours l’exercice de la
patiente, de l’attente, du doute, de l’improvisation. Les priorités ont été réordonnées. Ma vie a gagné une nouvelle dimension. Encore enceinte il fallait
penser à une autre vie que la mienne. Et le jour de sa naissance mon monde a
basculé, mes repères ont été revus et ses pleurs, son odeur, sa chaleur m’ont
vite fait comprendre que mon petit avait besoin de moi. Sa vie et sa survie en
dépendaient de mes choix, de mes actions. C’est lourd tout ça... mais c’est aussi
merveilleux !
Je suis devenue maman en tâtonnant, sans jamais être vraiment sûre de quoi
que ce soit. Je n’avais, et encore aujourd’hui, que cet amour indescriptible comme guide pour m’occuper de mes enfants. Et puis il fallait continuer la vie,
il fallait continuer à être tout ce que j’étais avant d’être maman :
épouse, fille, sœur, belle-fille, professeur, doctorante... et encore mamãe.
Tout ça, je vois aujourd’hui avec du recul, a été vécu aussi d’une posture
observatrice. La France est mon pays, mon pays de choix, le pays que j’ai
adopté. C’est naturel des allers-retours culturels dans mon quotidien. C’est
même impossible de ne pas être dans une telle démarche.
Mon vécu en tant que professeur (à l’Education Nationale, à l’université,
dans la fonction publique) et étudiante en France additionné aux relations
tissées au long de ces dernières années m’ont fait pensé que je ne voulais pas
que mon garçon soit pris dans l’engrenage d’un système que j’observe qui fait
plus de maux que de biens. Des personnes, des français, très proches à moi,
avec une capacité affective/sociale/cognitive incroyable ne se sentent pas à la hauteur de leurs vies. Ces personnes, des personnes que j’aime bien, n’arrivent
pas à se détacher d’une vision négative de soi qui, à mon avis, vient beaucoup
de l’école et de la façon comme les enfants sont pris en charge par le système éducatif. A mon avis, le cartésianisme français donne place à un pragmatisme
vide de sens et surtout d’affectivité. Résultat : des personnes avec une
très basse estime de soi. (Je sais que ce problème n'est pas exclusivement français
et je suis aussi consciente que l’école n’est pas la seule responsable non plus.)
Je vivais très mal l’idée de mettre F. à l’école pour les raisons évoquées
ci-dessus. En plus, ce caractère « garderie » de l’école maternelle
ne me plaît pas. Certes, aujourd’hui je fais garder mes enfants (assistante maternelle
et crèche) parce que nous travaillons, mais nous savons (et là j’emplois la 1ère
personne du pluriel) que la décision d’avoir des enfants nous revient à 200% et
que c’est notre responsabilité aussi d’assurer leur éducation. Le système dans
lequel nous vivons nous fait croire qu’il est naturel d’avoir des enfants sans
que cela modifie notre vie (d’ailleurs je pense qu’une partie non négligeable de parents, soit ici soit au Brésil – les deux réalités que je connais bien –
ont une vision assez troublée de ce qui représente vraiment avoir en charge la
vie d’un autre être humain). Et pourtant si je voulais que rien ne change il
suffirait de ne pas avoir des enfants !
Avec le délai sur ma tête pour déposer le dossier de demande d’une place à
l’école et le sentiment de ne pas vouloir suivre le discours du « parce
que c’est comme ça », j’ai tapé sur Google deux mots « école
obligatoire ». En moins d’une seconde c’est un nouveau monde qui s’est,
heureusement, ouvert à nous.
Depuis presque un peu plus d’un mois maintenant je me documente sur le
sujet de « l’instruction en famille » (IEF).
En parlant à mon mari à
propos de mes inquiétudes sur l’école française et la possibilité d’une voie
alternative, j’ai trouvé le soutien dont j’avais besoin pour continuer mes
lectures, mes remises en questions. En fait, il m’a rejoint et même si nous
avons très peur (mais elle est toujours quelque part cette peur) et beaucoup de
questions, nous savons, pour l’instant, ce que nous ne voulons pas. C’est un
premier pas et nous sommes très contents de le faire. Ensemble. Pour nous et
surtout pour nos enfants.